
« Attentif au sang versé, le Seigneur se souvient – Il n’oublie pas le cri des humiliés. Fais-moi grâce, Seigneur ! Vois ma misère devant ceux qui me haïssent ; hausse-moi au-dessus des portes de la mort. » (Psaume 9,13-14)
« Je n’ai pas jugé bon de savoir quoi que ce soit parmi vous, sinon Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié. » affirme l’apôtre Paul dans un cri du cœur aux chrétiens de Corinthe (1 Co 2,2). Oui, la Croix du Christ reste pour toujours le rappel de ce qu’est l’Évangile : un Messie mis à mort. Et sur cette Croix, il faut bien le reconnaître, ce sont nos « images de Dieu », et nos propres projections, nos attentes envers le Messie, qui sont aussi mises à mort. Puisque, en Christ, Dieu vient révéler que le chemin de son Amour pour notre humanité n’est pas celui d’une Toute-Puissance qui ferait table rase de notre propre liberté, de notre propre responsabilité. Jésus vient nous rejoindre dans nos limites… dans nos vulnérabilités… dans nos failles, nos blessures. En Christ, le Dieu Vivant vient habiter avec nous dans le manque – c’est tout le « programme » des Béatitudes (cf. Mt 5, 1-12), qui nous sauve de la tentation de croire que « si les choses sont comme ça (ou les gens), c’est donc que Dieu s’en moque,ou qu’Il est impuissant, ou qu’Il n’existe pas. » Ou pire encore : « que nous méritons ce qui arrive ».
C’est là, très précisément, que se déploient le scandale et la folie de l’Évangile ; c’est là que Dieu vient planter sa Croix, en ce monde et dans notre propre vie : en nous certifiant « qu’Il n’oublie pas », ni les cris, ni le sang, ni la valeur d’une seule vie, sur cette terre. Le chemin de vie de Jésus lui-même nous rappelle que « ce qui nous arrive » n’est pas toute la mesure de la Justice Divine, et que la vie à laquelle nous sommes appelés, en Dieu et par Dieu (la vie proprement spirituelle) est infiniment plus grande que toute forme de mal et de mort. Reste à nous ouvrir à cette humilité (confesser à Dieu sans crainte toute forme de misère) qui est la porte du Secours spirituel qui arrache à la mort de l’âme. Comme le dit Jésus lui-même : « Qui s’abaisse sera élevé » (Lc 14,11). Mouvement de la prière…