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Eglise protestante de Genève
Bible ouverte

Miryam

Le récit de la naissance de Moïse, au travers des yeux de sa sœur, Miryam, sœur de Moïse, a été proposé par Florence Auvergne-Abric, à l’occasion d’une rencontre ‘Bible et Aventure pour les Mômes’ organisée par le Ministère cantonal Enfance de l’EPG le samedi 8 février 2025.


Voici une petite fille. Elle s’appelle Miryam. Elle est née et a grandi en Égypte. La vie en Égypte n’est pas facile : ni pour elle, ni pour sa famille, ni pour ses ami.es. Elle fait partie du peuple hébreu. Ce peuple aime Dieu et Dieu aime ce peuple. Être aimé aide à vivre mais être aimé ne veut pas dire que l’on ne subit aucune injustice.  Et c’est le cas du peuple hébreu.

Le roi d’Égypte, le pharaon, déteste le peuple hébreu. Il les trouve trop nombreux, pas assez obéissants, mais surtout trop nombreux. Cela fait peur quand des gens que l’on considère comme des étrangers sont nombreux : cela veut dire qu’ils sont en bonne santé, heureux, qu’ils ont confiance en l’avenir et qu’ils ont des enfants. Et si on n’est soi-même pas très sûr de soi, que l’on craint pour son pouvoir, le bonheur de ces étrangers fait peur.

C’est pourquoi les Égyptiens regardent de travers les Hébreux. Pourtant, les Hébreux sont bien utiles aux Égyptiens : ils font tout ce que les Égyptiens ne veulent pas faire : construire des routes, des pyramides, des temples. Ils portent, creusent, soulèvent, nettoient, plantent, récoltent, et même se battent contre les ennemis du pharaon. Toute la journée. Toute leur vie. Ils sont très mal payés pour leur travail, parfois pas du tout. Et pourtant, ils continuent de vivre, de travailler, mais surtout d’aimer Dieu et d’être aimés de Dieu.

Les femmes hébreux ne sont pas en reste : elles font ce que les Égyptiennes ne veulent pas faire : elles cuisinent, lavent, cousent, dépoussièrent, plantent, creusent, récoltent, portent les enfants, les nourrissent. On pourrait penser que les Égyptiens et les Égyptiennes reconnaissent le travail des Hébreux, s’en félicitent et les laissent tranquilles. Mais non. Le pharaon dit et redit : « Ils sont trop nombreux. Il faut que cela cesse. » Et le pharaon se demande comment faire cesser le bonheur d’un peuple entier quand ni le travail, ni les privations, ni les insultes suffisent à le faire disparaître ?

« C’est injuste ! » pense Miryam. Elle le sait, au fond de son cœur, que ce qu’elle voit chaque jour, les hommes qui s’éreintent, les femmes qui s’épuisent, ce qu’elle voit n’est pas juste. Et Miryam a comme une boule de colère au fond d’elle. Cette colère est comme un feu qui ne s’éteint jamais tout à fait : il ressemble aux braises qui sont toujours alimentées dans le four à pain. Le feu du four ne doit jamais être étouffé, il doit rester allumé jour et nuit pour que le pain puisse cuire au moment voulu.

La boule de feu de la colère de Miryam ressemble à ces braises toujours rouges. Elle lui donne de l’énergie et du courage. Le courage de s’indigner contre ce qui n’est pas juste. Parfois la colère aide à faire des choses qu’on n’imaginait pas possibles. Parfois elle brûle tout sur son passage, comme le feu dévorant. Pour l’instant, la colère de Miryam lui tient chaud mais ne la consume pas. Elle l’aide à voir ce qui ne va pas autour d’elle.

Elle l’aide à …danser aussi ! Car Miryam adore danser. Quand elle danse, elle oublie les injustices, elle oublie le soleil trop chaud et les journées trop longues, elle oublie les cris des Égyptiens et des Égyptiennes. Miryam danse et c’est comme si ses pieds donnaient leur rythme au monde entier ! Mais le pharaon ne voit pas danser Miryam.

Le pharaon dit : « Les Hébreux sont trop nombreux. Il faut que cela cesse.  Et j’ai trouvé comment empêcher le peuple hébreu d’être toujours plus nombreux. À partir d’aujourd’hui, j’ordonne que l’on tue tous les bébés garçons hébreux qui naîtront. »

« C’est injuste, c’est cruel, c’est dément ! » crie Miryam. « Qu’ont-ils fait ces bébés, à part naître garçons ? Pourquoi leur vie doit-elle être plus courte que celle d’un papillon ? Que celle d’une fleur ? Plus courte que le jour ? Pourquoi leur début serait déjà leur fin ? » Miryam trouve cela tellement insupportable qu’elle n’a plus envie de danser.

Elle n’est pas la seule : tous les hébreux sont horrifiés et en particulier les parents qui attendent un enfant. A cette époque, il était impossible de savoir avant la naissance si le bébé serait fille ou garçon. Ce qui fait que plus personne, parmi les hébreux, n’ose se réjouir de voir le ventre d’une maman s’arrondir : si le nouveau-né est une fille, elle vivra. Mais si le nouveau-né est un garçon…il mourra.

Et justement, la maman de Myriam est enceinte. Son ventre est déjà très rond. Le temps est venu pour elle de savoir si son ventre abrite la mort ou la vie. Elle met au monde … un garçon. Elle pleure : elle ne peut pas se résoudre à laisser les soldats emporter son enfant pour le tuer.

Alors elle le cache. Toute la famille l’aide pour cela. Le père, les frères plus âgés et surtout Miryam. Miryam veille. Sa colère l’aide à mieux observer, à mieux voir. Voir quand des soldats entrent dans leur rue. Voir quand un voisin ou une voisine mal intentionnée voudrait les dénoncer. Myriam veille et protège.

Le bébé garçon grandit : il a maintenant trois mois. C’est petit, trois mois, c’est encore un bébé. Mais cela devient épuisant de le cacher, de l’empêcher de pleurer. Jamais la maman ne peut le promener hors de la maison. Jamais Myriam ne peut danser de joie d’avoir un petit frère, se réjouir et le présenter à ses amis. Alors la maman se décide à l’abandonner : elle prend un panier, y pose délicatement son bébé, le couvre, elle l’embrasse une dernière fois et le pose sur l’eau pour que le fleuve l’emporte. Puis elle part. Vite. Pour ne pas voir les vagues ensevelir le panier, pour ne pas entendre son bébé qui rit de voir les roseaux bouger à travers le voile qui le recouvre.

Mais quelqu’un guette à travers les roseaux. C’est Miryam. Elle a vu sa mère s’enfuir de la maison à petits pas en jetant derrière elle des regards inquiets. Elle a compris ce qui se prépare. Et la boule de sa colère a encore gonflé. « C’est injuste ! » se dit-elle. « Ça ne se sera pas. » Elle est sûre qu’elle pourra rattraper le panier. Et l’emporter. Où ? Comment ? Peu importe ! Tout sauf accepter que le panier se renverse et que ce petit frère qu’elle aime déjà si fort soit noyé. Elle court en aval de la rivière pour pouvoir intercepter le panier quand il passera à sa portée.

Alors qu’elle a déjà les pieds dans l’eau, les bras tendus pour saisir le curieux petit bateau, elle entend une musique. Des tambourins, des flûtes. Si elle n’était pas si concentrée sur le panier, elle danserait. Il s’agit de la princesse ! La fille du pharaon, qui vient prendre un bain, accompagnée en musique de ses servantes. Vite, Miryam s’accroupit et se cache dans les joncs. Elle observe.

La princesse s’approche du bord de l’eau et voit le panier. Elle envoie immédiatement une de ses servantes le sortir de l’eau.

La princesse soulève le léger voile qui couvre le panier : le bébé se met à pleurer. « C’est un garçon hébreu ! » dit- elle. Elle le soulève et le presse contre elle. Le bébé arrête aussitôt de pleurer et le cœur de la princesse se remplit de tendresse pour ce petit être qui aurait dû mourir. À présent, sa survie dépend d’elle, la princesse. Miryam sort de sa cachette.
– Majesté, dit-elle en se prosternant. Voulez-vous que j’aille chercher une femme qui pourrait s’occuper de l’enfant ?
– Tu es bien téméraire, jeune fille. Mais oui, c’est une bonne idée. Trouve-lui une nourrice, qui lui donnera de son lait et le fera grandir. Je la paierai pour cela.

Miryam court jusque chez elle : elle trouve sa mère les yeux rougis par les pleurs, sans force.
– Mère, venez, vite ! La fille du pharaon, la princesse, a trouvé le panier dans lequel vous avez glissé mon petit frère.
– Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes, Miryam. Ne parle pas si vite, je ne comprends rien.
– La fille du pharaon, la princesse, a trouvé le panier dans lequel vous avez glissé mon petit frère. Elle l’a sorti de l’eau et cherche une femme capable de le nourrir. Elle m’a envoyée pour cela. Et c’est vous qui allez venir : c’est magnifique ! Vous comprenez ? Vous pourrez continuer de vous occuper de lui, comme avant, mais cette fois au regard de tous. Plus besoin de se cacher ! Vous et mon petit frère serez sous la protection de la princesse !
– Miryam, ma fille, comme tu es astucieuse ! Béni soit notre Dieu ! Que les montagnes et les collines soient les témoins de ma joie. Danse ma fille, danse, pour célébrer le Seigneur qui t’a donné le sens de la justice et l’esprit plein de malice. Danse !

C’est ce que fait Miryam : elle danse ! Ce jour-là et les suivants. Chaque fois qu’elle va voir sa mère chez la princesse, chaque fois qu’elle voit son petit frère – c’est son secret – qui grandit et devient fort comme les roseaux qui bordent le fleuve.

La princesse égyptienne lui a donné le nom de Moïse qui signifie : « Sauvé des eaux. » Moïse grandira à la cour du pharaon. Protégé par la princesse. Nourri par sa mère. Chéri par sa sœur Miryam. Ces trois femmes lui ont offert protection, force et amour. Ces trois femmes lui ont chacune sauvé la vie. Et ce triple miracle lui donnera le courage d’affronter Pharaon et de mener le peuple de Dieu vers la liberté. Mais ça, c’est une autre histoire. Celle d’aujourd’hui se termine sur une danse.


Note : Les textes des prédications présentées dans le cadre de la série ‘Prédication de la semaine’ sont susceptibles d’avoir été légèrement adaptés au présent support (site Internet) et à l’audience de ce dernier. Les adaptations restent mineures et n’affectent en rien le sens de la prédication originale.

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